mercredi 30 janvier 2019

Dans les yeux d’Anaïs

  

Qu’est-ce qui brille dans les yeux d’Anaïs,
Dissimulée tout au fond de son iris,
Une lueur intime qui transparaît
En soulignant très légèrement ses traits
Avec cependant un rien de retenue,
Fruit d’une nostalgie de ce qui fut,
Ou peut-être de ce qui aurait pu être,
Bien différent du simple art de paraître.


Dans les yeux d’Anaïs, qu’est-ce qui brille
Bien tapi au fond de ses pupilles,
Qu’est-ce qui se dessine de son être,
Un geste qui lui échappe peut-être,
Une expression, un petit air narquois
Vite réprimé, fait d’on ne sait quoi.

    

Comment savoir pour simplement dire
Ce qui dans sa nature peut séduire,
Ces petits riens qui font tout son charme
Ne dévoilant presque rien de son âme.

Dans la voix d’Anaïs, qu’est-ce qui m’émeut 
A ce point que j’en ai le cœur en feu,        
Un petit trémolo pour le mauvais temps,
Ses longs cheveux vaporeux flottant au vent,
Quelques trilles pour célébrer le printemps :
Belle parenthèse pour un beau moment.
 
Mais la magie a disparu
Et en moi tout s’est confondu, 
Son image s’est estompée
Fondue dans la réalité.

Tout s’est alors brisé

Et le charme est tombé.


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vendredi 25 janvier 2019

Tourner la page

 

Tourner la page, quel beau pari,
Comme ça, sans vraiment y penser
N’est-ce pas super en vérité,
Ça paraît facile a priori,
Méfiez-vous, rien de plus malaisé,
Rien n’appelle plus de fermeté :
Partir ainsi sans se retourner
En rejetant ce qui a été,
Errer sur les chemins de hasard
Où d’aléas, chacun a sa part.

Mon dieu, pauvres mortels que nous sommes,
Déjà aux temps antiques de Rome
Soumis à la merci des trois Parques
Quand on peinait à prendre ses marques,
Divinités qui tiennent les rênes
Célestes de l’aventure humaine,
Qui tissent les fils de nos destins,
Qui règlent le mal et le bien,
Tout ce qui, ici-bas, nous retient
Et puis, malgré ce qu’il advient,
Restent les êtres qui nous sont chers,
Tous ceux qu’on chérit comme des frères.

Prise entre désirs et innocence
Dans le tourbillon de l’existence,
Se demanderait Valéry, que
Devient maintenant la Jeune Parque ?

Dans ma vie, j’en ai tourné des pages,
J’en ai chassé aussi des mirages
Jusqu’à épuiser toute ma rage
Mais en suis-je devenu plus sage
Pour autant, suis-je plus mûr…

À l’évidence, rien n’est moins sûr. 
Ai-je au moins gardé cette innocence
Que l’on dit héritée de l’enfance ?

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samedi 12 janvier 2019

Un conte de Noël

Un conte de Noël : Circé et le loup

            

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C’était par une froide nuit de décembre quand une jeune fille nommée Circé s’enfonça dans les sombres profondeurs de la forêt. Pour rejoindre le village de sa grand-mère à qui elle rendait visite, Il lui fallait cheminer sur un sentier gelé parmi ces milliers d’arbres au fût élancé, ces « colonnes du ciel » comme les appelait Bernard Clavel, qui par endroits masquaient l’étroit chemin.  

Circé restait vigilante, attentive aux bruits familiers de la forêt, une branche qui s’affaisse sous le poids de la neige, le givre qui craque sous ses pieds. Pas de bruit suspect pour l’instant, si ce n’est le départ furtif d’un rongeur qu’elle avait dérangé.

Malgré un petit pincement de cœur, elle n’avait pas peur. Sa Mère Grand le lui avait bien dit : « Ma petite, un jour ou l’autre tu verras le loup mais n’ait pas peur, il paraît beaucoup plus méchant qu’il n’est en réalité. » Elle aimait beaucoup sa Mère Grand et la croyait sur parole. Son frère aîné qui était un chenapan de première, lui avait confié d’un rire sonore : « C’est vraiment bizarre, les filles ont peur d’un rien, d’une souris ou même d’une araignée mais elles n’ont jamais peur du loup !» Ah, ah, ah… » 

Elle ne trouvait pas ça drôle du tout…  les garçons sont bizarres. Heureusement, son ami Pierre qui était doux comme un agneau, devait s’y connaître en loup puisqu’il lui avait écrit un joli poème intitulé « Pierre et le loup ».

Cette nuit était vraiment très froide mais elle avait pris ses précautions, enfilé un gros collant et son Damart, une large cape rouge au tissu innervé de fibres auto chauffantes et un épais bonnet, rouge lui aussi, que lui avait offert Mère Grand. Les mains bien enfoncées dans ses poches, les écouteurs aux oreilles, elle se distrayait en écoutant les chansons à la mode et malgré le froid, consultait de temps en temps ses messages ou en envoyait à ses amies. Ainsi elle avait moins l’impression d’être seule dans cette immensité glacée.

Elle arrivait tout près du village de sa chère Mère Grand quand soudain, au détour d’un dernier chemin creux, elle tomba nez à nez avec elle. C’est à peine si elle la reconnut avec ses grandes dents, cet accoutrement inhabituel et ce regard si perçant qu’elle ne lui connaissait pas.

- Mais que fais-tu là grand-mère par ce froid glacial ?
- J’étais allée chercher quelques provisions que j’avais oubliées d’acheter. Ah, que veux-tu, ma mémoire faiblit, elle n’est plus ce qu’elle était…
Quelle voix curieuse avait-elle donc aujourd'hui se dit Circé, soucieuse de ces transformations mais s’efforçant de n’en rien laisser paraître.
Tout sourire, elle invita sa petite fille à venir prendre une collation chez elle.
- Tu as bien un petit moment à me consacrer ; tu sais, à mon âge, je ne reçois guère de visites.
C'est quand même bizarre, se dit Circé, grand-mère si fière d'habitude et qui ne se plaignait jamais.


        
 

------------------------------------------ 2 -----------------------------------

Elle en était là de ses réflexions quand elle reçut un message sur son téléphone.
- Une de tes amies peut-être… ou alors un petit ami qui se languit de toi, s’enquit Mère Grand d’un air chafouin.

En fait, c’était un SMS de son ami Pierre qui s’inquiétait, l’avertissant qu’un vieux loup solitaire rôdait autour du village de sa grand-mère et qu'elle devait rester sur ses gardes.
Dominant son émotion, la jeune fille n’en laissa rien paraître, continuant à complimenter la vieille dame sur ses beaux atours et sa bonne mine.


Cette fois, c’en était trop. Dans son esprit, tout prenait sens, chaque indice s’insérait dans le message de Pierre comme chaque pièce d’un puzzle. Elle ravala sa peur, essayant de prendre une contenance qui ne trahisse pas ses émotions.

- Oh, excuse-moi grand-mère, accorde-moi quelques instants je te prie, ma copine Nathalie a un problème et il faut que je joigne tout de suite Pierre pour qu’il aille la voir.
Il n'y avait plus une seconde à perdre. Aussitôt, elle se connecta au site en ligne SAMI (Super AMazon Intersidéral) pour commander en urgence absolue une super baguette magique dotée de pouvoirs surnaturels, équipée d’un système de translation d’électrons avec simulateur onirique, qui lui serait livrée en temps réel. 

- Voilà grand-mère, j’ai envoyé mon message. Il ne reste plus qu’à attendre la réponse mais rassure-toi, elle ne va pas tarder.
- Ah ma chère petite, je me sens si vieille face à toutes ces nouveautés qui me dépassent.  Allez, viens vite à la maison, nous allons prendre froid à rester immobiles par ce temps.
Mais la jeune Circé était de plus en plus persuadée que le loup, par un maléfice démoniaque, avait pris le contrôle de sa grand-mère pour mieux parvenir à ses fins et dévorer tout cru la tendre enfant qu'elle était.

- Un peu de patience s'il te plaît Mère-Grand. Ce ne sera pas long. Tu sais, avec ma liaison ultra rapide, Il ne faut guère que quelques picosecondes pour transmettre les données ; et parfois encore moins. Ça ne devrait plus tarder.
Et effectivement, quelques instants plus tard, un vrombissement se fit entendre au-dessus de leur tête et un drone atterrit près des deux femmes.
- Oh, quelle merveille de technologie, on n’arrête pas le progrès, ne put s’empêcher de s’écrier la grand-mère, pleine d’admiration.

Pendant ce temps, Circé avait rapidement décroché le paquet de l’appareil et retiré la précieuse baguette magique de l’emballage.
La grand-mère, qui ne se doutait de rien, trouvait la situation cocasse et demanda à Circé comment elle comptait aider son amie Nathalie avec cet instrument qui scintillait et dont le bout effilé émettait une lumière vert fluo du plus bel effet.

- Tu vas voir grand-mère, répondit-elle en riant, et tu ne seras pas déçue !
Le regardant droit dans les yeux, elle déclama en gesticulant ces premiers vers d’un poème de Rimbaud, comme une formule magique :
Le loup criait sous les feuilles
En crachant les belles plumes
De son repas de volailles :
Comme lui je me consume.


Elle se mit ensuite à pousser des hurlements en brandissant sa baguette magique « hou, hou, hou… où est le vilain loup qui se cache, hou, hou, hou…  montre-toi sale bête » !
Immédiatement, le loup jaillit de la grand-mère, il en fut comme éjecté par une force irrésistible et resta tétanisé par la découverte de sa mystification.

Puis de la même façon, elle reprit ses mimiques, frappant le sol du pied en émettant de petits bêlements plaintifs « Bê, bê, bê… , oh, où suis-je donc,  Bê, bê, bê… » et, médusée elle-même par ce qui se produisit, le loup se transforma en mouton.
Un simple mouton, commun, pas même d'une race noble et tout étonné de se retrouver dans cette situation peu enviable. La face sombre du loup s'était effacée pour laisser place à ce petit animal inoffensif.

Mais sa joie fut de courte durée...

       ------------------------------------------ 3 -----------------------------------

- Oh mon dieu, que se passe-t-il ! s’écria Circé en serrant sa grand-mère contre elle. Elles n’en croyaient pas leurs yeux et la grand-mère murmura en se cachant dans la cape de sa petite-fille : « Ah, Voilà le cauchemar qui recommence. »

Au bout de quelques minutes, la magie avait disparu et le loup reprit vite son aspect de bête sauvage aux abois. La jeune fille avait trop présumé de ses pouvoirs qui s’étaient évaporés comme par enchantement. Elles tremblaient de tous leurs membres devant la vision infernale du loup ressuscité qui les menaçait.

Circé se reprochait de n’être qu’une débutante, de manquer d’expérience et de s’être laissée emporter par son émotivité. Dans le feu de l’action, elle avait oublié de répéter la formule magique des vers rimbaldiens, elle avait sous estimé les pouvoirs magiques de la poésie, sa faculté de rendre intelligible ce qui nous dépasse.

Elle eut beau brandir de nouveau sa baguette en tous sens, la magie fit vite long feu. Elle mélangeait les vers de Rimbaud, s’énervait sans parvenir à inverser le maléfice. Le loup, sûr de sa victoire, riait de toutes ses grandes dents en imaginant le succulent festin qu’il allait faire.

- Ah, ah, ah, lança-t-il avec un rire sardonique, ainsi vous voilà à ma merci. Oh, par tous les diables, j’en salive d’avance !
Puis, devenant soudain sérieux, il ajouta dans un aveu qui sonnait comme un remords :

- Vous savez, je ne suis pas foncièrement méchant, mais telle est ma nature…
- Pitié, pitié, supplia Mère Grand, prenez ma vie, j’ai bien assez vécu, mais je vous en prie, épargnez ma petite fille !
Dans le silence glacé de la forêt, on n’entendait que les pleurs de Circé et les gémissements désespérés de sa Mère Grand.


C’est alors qu’on perçut au loin un tapage étonnant, du bruit, de la musique, tout un équipage qui se rapprochait rapidement du grand arbre où elles s’étaient réfugiées. Un petit oiseau voleta au-dessus d’eux et repartit aussitôt avertir les autres.
Circé et sa grand-mère tremblaient de peur sous leur abri dérisoire, sûres de bientôt succomber sous les griffes du loup. Mais curieusement, il ne bougeait plus, figé au milieu du chemin, tendant au vent ses grandes oreilles et son long nez, incrédule, se demandant quelle était la cause de ce remue-ménage. On aurait dit que la forêt se réveillait de sa léthargie hiémale.

Dans cet aimable jeune homme qui accourait, Circé reconnut Pierre chaussé de ses bottes de sept lieues et d’un gilet jaune à bandes réfléchissant la couche d’ozone, entouré de ses amis les animaux venus en toute hâte les secourir. En fait, il avait invité tous ses amis les animaux pour préparer la crèche et fêter tous ensemble le beau mystère de Noël. Aussi l’avaient-ils suivi avec joie et empressement pour l’aider à sauver Circé et sa Mère Grand. 

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Pierre
et tous ses petits amis de la basse cour exécutèrent une ronde infernale, lançant au loup furieux et apeuré qui poussait des hurlements terribles de bête blessée, des formules incantatoires en rétrécissant peu à peu le cercle autour de lui.

Ils dansèrent ainsi plusieurs minutes qui parurent aux deux femmes une éternité.  Les merles jouaient en cadence de la flûte traversière, le canard du hautbois, le chat de la clarinette et le gros pataud de chien tournait en cadence autour du loup en soufflant dans son basson. Les cors puissants et sonores des ânes semblaient annoncer l’hallali dans une profusion de sons et de lumières.

Le loup, si fier d’habitude, si orgueilleux, pleurait maintenant, poussant de petits cris plaintifs, se repentant par avance de ses mauvais penchants. Circé et Pierre avaient plutôt pitié de ce pauvre hère si faible et si honteux.

Circé hors d’elle, sans bien comprendre encore ce qui arrivait,  se jeta dans les bras de Pierre en sanglotant. Puis ils suivirent en cadence la farandole des animaux en tapant dans leurs mains. Devant ce spectacle édifiant, elle se demanda si dans chaque loup ne sommeillait pas en son sein le plus secret la douce présence d’un agneau.

Pierre se saisit alors de la baguette magique qui lançait des flashs lumineux en direction du loup, récitant d’un trait le quatrain de Rimbaud…  puis prononça avec une moue de dédain qui mortifia l’animal : « Le loup n’a plus les dents longues, non vraiment, il n’a plus du tout les dents longues ! »

Au moment où les douze coups de minuit sonnèrent au clocher du village pour appeler à la messe de Noël, des éclairs multicolores fusèrent dans le ciel comme un feu d’artifice annonçant la naissance du divin enfant et l’on crut distinguer dans un halo de nébuleuses le traîneau du Père Noël surfant sur les nuages, mu par une queue de comète incandescente.

C’est alors que le miracle se produisit : le loup fut comme électrisé, les membres raidis par un flux irradiant qui pénétra son corps, un nuage électrolyte le dissimula quelques instants à leur vue, et à la stupeur générale, apparut alors un loup transfiguré, montrant le meilleur de lui-même, soudain métamorphosé en Père Noël !

Ainsi s’opéra ce nouveau miracle de Noël, le "loup-Père Noël" s’en fut par tout le village, le sourire aux lèvres, l’air affable et avenant,  porter des douceurs et des jouets à tous les enfants, entouré de Circé, de Pierre et de tout l’orchestre des animaux qui l’accompagnait en jouant et en batifolant.
Comme quoi disait Alfred de Musset« il ne faut jurer de rien » !   

          

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Il ne faudrait jamais...

                
Il ne faudrait jamais regarder en arrière. D’abord parce que ça donne le torticolis et surtout parce que ça ne sert à rien. Ou plutôt si, bien sûr, à vous empoisonner la vie, brouiller les cartes, traîner ce boulet qui vous empêche de se sentir libre.
On ne se refait pas. Moi par exemple, je m’efforçais de me farcir la tête avec des tas de soucis, du boulot, agir, se sentir obligé. Mais le passé revenait en flots discontinus dans mes nuits agitées, pas moyens de s’en débarrasser. Ça vous ne la fait pas à vous aussi, des trucs qui  vous colle à la peau comme de la boue et hante vos nuits dans des histoires sans queue ni tête qui vous laissent en sueur et le cœur battant la chamade.
Un truc à vous bouffer la journée qui s’annonce. Et Après, on vous fit que l’homme est un animal pensant, un être rationnel qui organise son environnement. Si, si, j’ai déjà lu des conneries dans ce genre.
Je vais vous dire : à chacun ses fantômes.


La première, je l’ai connue Elle s’appelait Nicole, un prénom passe-partout, surtout à l’époque, des Nicole, des Monique, y’en avait plein les écoles. Et puis la mode avait passé, comme toujours. Elle était un peu comme son prénom, genre passe-partout, rien de remarquable, pas comme ces saletés de produits remarquables paraît-il, que le prof de maths s’échinait à nous entrer par effraction dans nos tronches de potaches.    
Je n’ai jamais su pourquoi je lui avais tapé ans l’œil. Finalement, peu importe, y’a des tas de choses que je ne m’explique pas, que je ne comprendrai jamais ; pas de quoi se prendre  la tête. Des trucs sans intérêt juste bons pour le prof de philo. Faudra que je vous en parle un peu de celui-là, on pourra se marrer un peu. Mais quand même,  ça ne faisait bizarre d’être la star d’une nana. Pourtant  je n’ai rien d’un James Dean, une des stars de l’époque.
fantasmait – il n’est pas sûr que je gagne à être connu.
pas du genre intello mais focalisait sur  je devais lui rappeler son père… ou le facteur

Ce qui m’avait très vite frappé : son manque d’humour. Pas moyen de lui faire saisir les jeux de mots, d’autant plus dommage que le Français s’y prête très bien. Un jour, c’était tout au début de notre relation, plongée dans l’horoscope d’un journal à la con, elle commence à me lire ce que prévoyais mon signe pour les jours à venir. Bon, je m'y prête avec fatalisme tout en la regardant d’un air goguenard. Pas vraiment fine mouche, elle s’en aperçoit quand même.
- Je vois que u ne crois pas du tout aux prédictions et pourtant
- Statistiquement, c’est indéniable  qu’une occurrence quelconque doit bien se présenter de temps en temps. Problème uniquement statistique.
- Ce n’est pas une question de chiffre. On n’y croit ou pas et toi, tu n’y crois pas du tout, n’est-ce pas, ça ne t’intéresse absolument pas.
- Si, si, détrompe-toi, je trouve ça très intéressant.
Normalement, elle aurait dû se méfier, s’attendre à une répartie décalée, à une remarque hors contexte. Mais non.
- Ah, je croyais que pour toi c’était… de la foutaise.
- Loin de moi une telle idée mon amour adoré. C’est au contraire très intéressant, une telle batterie de conneries en si peu de temps, c’est un recors que seul l’horoscope peut atteindre.
Haussement d’épaules et moue de dégoût.
- Avec toi, on ne peut jamais discuter. Tu n’es jamais sérieux. D’abord ce n’est qu’un divertissement que je ne prends pas forcément au pied de la lettre.
Il fallait toujours qu’elle ait le dernier mot et qu’elle retombe sur ses pieds. Voilà le genre de dialogue édifiant auquel on s’adonnait. J’adorais la titiller, la mettre en porte à faux, elle aimait bien me contester pour avoir le dernier mot et sans doute prouver une espèce de supériorité qu’elle avait par ailleurs du mal à imposer. 
Provocation contre contestation ; tout un art de vivre.
En public, elle appréciait moins mais, à part quelque grain de sable dans notre sablier d’éternité, on avait toutes les chances d’être heureux dans les siècles des siècles, jusqu’à la parousie. À moins que le diable s’emmêle les pinceaux dans les fils de nos destins qui, pour l’instant, n’en faisaient qu’un.
Grand amour émaillé de disputes, de noises, de crises, des caractères qui se frottaient comme des épidermes. Son mépris était à la hauteur de mes saillies, ce qui est encore une façon de me hausser tant ce ressentiment rentré qui n’appartient qu’à elle, constituait la panacée de (supériorité) 
Ne croyez pas que nous passions notre temps en chamailleries, le travail occupait nos jours sinon nos nuits. Nous étions en notre jeune temps industrieux comme de petits bourgeois, poussant autant que possible nos maigres compétences pour en tirer de maigres revenus. Autant dire que notre équipage était des plus réduits mais nous ne nous en plaignons guère, vivant alors surtout d’amour et d’eau fraîche… et de quelques autres ingrédients indispensables pour tenir son rang.
C’était du moins ce que voulait madame. Et moi je ne voulais rien. Aussi m’imposait-elle ses vues sans coup férir, me rendant à ses arguments de guerre lasse.
Je me vengeais par quelque (saillie) publique
L’autre jour, repas de famille dominical comme il se doit, les usages étant fort prisés et respectés dans sa famille. J’y coupais quand je pouvais mais pas cette fois-ci.
Il faut toujours tout que tu ramènes tout à xx
Il fréquente (formule de la fréquence) qui se répète, basse tension entre 30 kHz 300 kHz + vitesse du pouls=vitesse des battements – modulation de fréquence=variation de la fréquence  de l’onde porteuse au rythme des signaux modulateurs, les amplitudes de l’onde restant constantes.
[la culotte, couleur par beau-frère]
[le petit pois qui tombe dans son soutien-gorge, elle se trémousse pour s’en débarrasser et nous, on l’accompagne en faisant la danse des canards succès garanti me fusille du regard, me tétanise d’un coup de laser, s’opère un repli stratégique en regagnant ma chaise]
[le fisc qui (garage Ponthus) – ma tante
Elle « Tu n’es qu’un gros cochon » Moi « Oh… merci pour le compliment. » Elle, haussant les épaules «Tu ne prends jamais rien au sérieux. » 

[[- C’est prouvé, les femmes ont moins d’accidents que les hommes. Si, si, mon cher, asséna-t-elle en me regardant, satisfaite d’elle-même, consulte les statistiques, y-a pas photo !
- Et sais-tu pourquoi, lui rétorquai-je d’un air narquois.
Stupéfaction et méfiance, elle se demande où je veux l’entraîner.
Je prends mon temps, évasif. ]
- Les statistiques sont parfois trompeuses, tu sais. Ne dit-on pas que des données erronées donneront quand même de bons résultats…
Brillante alchimie, n’est-ce pas.
Elle, excédée par ma désinvolture.
- Ta mauvaise foi ne saurait remettre en cause ce constat : les femmes ont moins d’accidents que les hommes. Et même beaucoup moins.
Moi, en remettant une couche, sûr maintenant de la prendre dans mes filets.
- Oh, la raison est bien simple : c’est parce que les hommes les évitent.
Haussement d’épaules... et rire général. Le bauf plié en deux : « Tu es pris à ton propre piège. »
Moi, profitant de la situation.
- D’ailleurs, je viens d’acheter le dernier GPS. Formidable. Vraiment FORMIDABLE !
Tout le monde attend la suite sauf ELLE qui s’attend au pire. Et là, c’est mon créneau, elle ne sera pas déçue.
- GPS avec la fonction FAV s’il vous plaît.
Personne ne connaissait… et pour cause. Tout le monde attend la suite avec avidité ; mon bauf m’adresse un petit clin d’œil complice.
- Allez, ne nous fait pas languir davantage, lance quelque un.
- Hier, message pressant de mon GPS :
"Attention, attention, femme au volant, Faites demi tour immédiatement". Super je vous dis, le nouveau GPS. Pensez-y pour la fête des pères.
Chuchotis parmi l’aréopage des dames. Chuchotis et rites légers étouffés dans une main ou un mouchoir, rires gras et francs des mecs qui L’exaspèrent encore plus. ELLE prend un teint rosé qui lui sied à merveille.
Mais je n’en dirai rien, surtout devant tout le monde. Question de survie.]]


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Deux quatrains pour Noël

         
         
                     
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vendredi 11 janvier 2019

La vie couleur

Ciel
Et miel
Dans mon cœur
Qui bat si fort,
La vie en couleur,
Pas de gris, pas de pleurs,
Une vie qui vire au bleu
Dans la prunelle de tes yeux,
Qui tend au bleu tendre de la mer,
De ces bleus légers aux tons outremer.

Peu à peu se dessine au fond de tes yeux
Le bel éclat d’une palette arc-en-ciel
Sur le fronton de mon Panthéon personnel,
Des étincelles mutines aux couleurs de feu.

Ainsi passe une vie tout en couleurs 
Sans grands aléas ni grandes peurs,                 
Des tendres verts printaniers
Aux jaunes crus de l’été,
De la rouille automnale
Au blanc hivernal,
Telle est la flamme
Qui répond
À mon
Âme.


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Le temps des blouses grises

      
Les blouses grises                                      Le règlement     


C’était le temps des cartables et des blouses grises, 
Les coquetteries n’étaient pas vraiment de mise,
On était tous vêtus de la même façon
Dans la classe ou dans la cour de récréation. 

Personne alors ne recherchait l’égalité,
Ne pensait à se démarquer, à comparer,
Parler de parité eût été déplacé,
Du moins c’était comme ça jusqu’au lycée.

 
Le tableau noir                                 
La "Marie-Rose"

C’était le temps de l’estrade et des encriers,
L’instit venait en avance pour les remplir,
Les cahiers s’ornaient de pleins et de déliés,
On attendait que sonne l’heure pour partir. 

Sur l’ordre du maître, on sortait nos cahiers,
Des taches noires quelquefois les maculaient
Quand la plume sergent major accrochait
Légèrement la surface du papier.


Attentifs à la leçon, on croisait nos bras,
Aidant parfois ceux qui étaient dans l’embarras,
La craie blanche crissait sur le tableau noir,
On prenait des notes pour faire nos devoirs.


          
Encrier et buvard                          Le jeu de billes 

C’était alors l’époque des "trente glorieuses",

Comme certains la qualifièrent plus tard,
Des années faites paraît-il pour des veinards,

En fait ni très heureuses ni très malheureuses,

Époque incertaine faite aussi d’insouciance
Mais alors, nous n’en avions guère conscience
Tant la vie avait repris un cours plus normal
Après les souffrances dues au conflit mondial.   

Si l'on avait dit à cette génération
Qu’elle avait alors vécu des années bénies,
Où tout était facile et offert à foison,
Sûrement qu’elle en eût été fort ébahie !

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