Élégie vient du grec elegeia qui signifie « chant de deuil », et d’un point de vue de la forme, il s’agissait dans l'Antiquité, d’un poème composé de deux vers (distiques) qui alterne des vers de six pieds (hexamètres) et des vers de 5 pieds (pentamètres). Ces strophes distiques dites élégiaques ont connu beaucoup de succès dans l'Antiquité avec des poètes comme Catulle, Tibulle, Properce ou Ovide.

Par la suite, la forme s’effaça au profit de son contenu, marqué par la complainte, la mélancolie. D'une certaine façon, on revient à l’objectif d’origine, à la signification profonde du « chant de deuil », sachant que dans l'Antiquité, la métrique était assez différente des pratiques postérieures. Se référer maintenant au pentamètre et au hexamètre est donc pour le moins une approximation. [1]

               
L’élégie selon Chagall

L'élégie, comme tout poème lyrique, a un fondement religieux. Poème à règles fixes dans l'antiquité, elle est utilisée à partir de la Renaissance pour exprimer plaintes et regrets à travers une complainte qui exalte des sentiments romantiques.
Les sujets sont plutôt orientés vers la morale, la guerre ou l’amour car ce qui importe d’abord, c’est  le message à transmettre et de plus en plus la sublimation du sentiment amoureux. On trouve cette évolution dès le IIIe siècle avant J.C. avec Callimaque ou Philétas.

La Renaissance marque l’évolution qu’on a connue par la suite, sans changement notable. Il s’agit d’exprimer des sentiments intimes comme parfois la joie mais surtout la peine, la douleur, l’exil, l’angoisse sur un ton tendre et mélancolique, voire pathétique avec une forte subjectivité orientée vers le sujet, l’égo. La forme basée sur une recherche de rythme, de sonorité, d’images sert à exalter la profondeur des sentiments.

L’élégie devient ainsi un poème lyrique, mélancolique et méditatif qu’on trouve chez beaucoup de grands poèmes tels que Pierre Ronsard (1565), Goethe (1790), André Chénier (1819) ou Rainer-Maria Rilke (1912-1915). On peut y ajouter des œuvres de même facture, même si elles portent d’autres noms, comme Les Méditations poétiques de Lamartine (1820) ou Les Nuits de Musset (1835-1841).


Voilà un exemple d’élégie antique, ou plutôt une transcription actuelle, composée de quatre distiques alternant hexamètres et pentamètres : Voilà un exemple d’élégie antique, ou plutôt une transcription actuelle, composée de quatre distiques alternant pour chacun d'eux vers de 6 et 5 pieds par référence aux hexamètres et pentamètres :

Oh, lyre de ma Muse,
Tes airs légers fusent,

Tes sons si mélodieux
Atteignent les cieux.

Quand tes notes s’égrènent,
S’envolent mes peines.

Oh ma superbe lyre…
Et c’est si peu dire !

Et un autre exemple d’élégie moderne écrite en décasyllabes, où le contenu l'emporte désormais sur les conventions stylistiques :

Oh, venez à moi lyre et belle muse,
Jouez et chantez, qu’un peu on s’amuse,

Que l’on tournoie jusqu’au bout de la nuit
Et pour qu’enfin tous mes tourments me fuient.
Consolez-moi de rythmes, de musiques
Aux accents, aux sonorités magiques.


Il faut bien que le malheur succombe
Et qu’alors, si on perd pied, si on tombe,
On finisse un jour par se relever,
Même si les défis sont élevés,
Même si on sait fort bien que tout s’use,
Venez vite à moi lyre et belle muse.

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Notes et références
[1]
Pour une approche plus technique de la poétique antique, voir l'article

Le distique élégiaque --
Voir aussi
* L'églogue ou la bucolique --  Les genres poétiques --

* Voir aussi d'autres exemples dans la Rubrique Poétique --
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<< Christian Broussas, L'élégie 30/03/2020 © • cjb • © >>
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